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Les sciences sociales contre la République ? - Collectif des revues en lutte, Le Monde, 2 novembre 2020

mardi 3 novembre 2020, par Elie, Mariannick

Un collectif de revues de sciences humaines et sociales (SHS) met au défi le ministre de l’éducation nationale de trouver dans ses publications des textes permettant de dire que l’intersectionnalité inspire le terrorisme islamiste.

Mise à jour du 3 novembre : une fable illustrée.

Dans le JDD du 25 octobre, le ministre de l’éducation nationale déclarait qu’il y avait, dans les universités, un combat à mener. Contre l’appauvrissement de l’enseignement supérieur ? Contre la précarité étudiante ? Contre les difficultés croissantes que rencontrent tous les personnels, précaires et titulaires, enseignants et administratifs, à remplir leurs missions ? Contre la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR), qui va amplifier ces difficultés ? Non : contre « une partie non négligeable des sciences sociales françaises ». Et le ministre, téméraire : face à cette « gangrène », il faut cesser la « lâcheté ».

On reste abasourdi qu’un ministre de l’éducation nationale s’en prenne ainsi à celles et ceux qui font fonctionner les universités. Mais pour aberrants qu’ils soient, ces propos n’étonnent pas tout à fait : déjà tenus, sur Europe 1 et au Sénat, ils prolongent ceux d’Emmanuel Macron, en juin 2020, dans Le Monde, qui accusait les universitaires d’ethniciser la question sociale et de « casser la République en deux ». Plutôt que de se porter garant des libertés académiques, attaquées de toutes parts, notamment dans le cadre du débat parlementaire actuel, Jean-Michel Blanquer se saisit de l’assassinat d’un professeur d’histoire et géographie pour déclarer la guerre aux sciences sociales, qui défendraient des thèses autorisant les violences islamistes ! Sa conviction est faite : ce qui pourrit les universités françaises, ce sont les « thèses intersectionnelles », venues des « universités américaines » et qui « veulent essentialiser » les communautés.

Ignorance ministérielle

Le ministre « défie quiconque » de le contredire. Puisque les revues scientifiques sont, avec les laboratoires et les universités, les lieux d’élaboration des sciences sociales, de leurs controverses, de la diffusion de leurs résultats, c’est à ce titre que nous souhaitons mener cette contradiction, ses propos révélant son ignorance de nos disciplines, de leurs débats et de leurs méthodes.

Pour lire la suite.


Le Ministre et la "Faculté"

Le ministre s’étant reposé tout l’été,
Se trouva fort dépourvu
Quand la vague fut venue.
S’en prenant dans la panique
Aux libertés académiques,
Il alla crier scandale
Sur la paillasse de Vidal

Priant les chercheurs de cesser
La République « gangréner ».

Toutes les illustrations, toutes les références sont à lire dans ce thread déroulé ici

Face à cette ignorance abyssale
De ce que sont les sciences sociales
Nous envoyons au Père-Noël
Cette liste bien trop partielle

D’articles éclairants
Dont le ministre est ignorant

C’est là sa moindre iniquité

« Quelle guerre faites-vous à l’université ? »
Demandons-nous à l’éhonté.

— Pour le plaisir de l’anathème
J’essentialise votre domaine.

— Vous essentialisez les SHS ?
Eh bien ! Lisez ! Vite, ça presse.

(d’après Jean de La Fontaine)