Accueil > Revue de presse > Désaffection des universités : Paris 8 répond au ministère de l’enseignement (...)

Désaffection des universités : Paris 8 répond au ministère de l’enseignement supérieur et la recherche - Violaine Jaussent, Médiapart, 7 mai 2009

jeudi 7 mai 2009, par Laurence

Le mouvement contre le décret des enseignants-chercheurs provoque-t-il la désaffection des universités les plus en pointe ? Oui, si l’on en croit « les statistiques fournies par le ministère de l’enseignement supérieur » que le Journal du dimanche publiait dans son édition du samedi 2 mai : « Les vœux formulés par les actuels élèves de terminale [...] pour la Sorbonne (Paris-IV) chutent de 25% par rapport aux vœux exprimés en 2008. Un record à la baisse qui ne serait battu que par Paris-VIII (Saint-Denis), où la proportion atteint 50%... » écrivait le journal.

La riposte ne s’est pas fait attendre : l’université de Paris VIII sort aujourd’hui des documents qui montrent que le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche met en perspective des chiffres incomparables. Et surtout, joue avec eux.

D’après un document destiné aux Services académiques d’information et d’orientation (SAIO) de Paris, Créteil et Versailles produits par le ministère lui-même et auquel Mediapart a eu accès, les demandes d’inscriptions étudiantes à Paris VIII étaient de 3.060 l’an dernier. Elles sont de 3.380 cette année. Pas besoin d’être fort en maths pour s’apercevoir qu’il n’y a pas de baisse de 50% entre 2008 et 2009. Voir le document joint.

Pourtant le ministère maintient aujourd’hui ses dires : pour lui, seuls 1.470 élèves de terminale ont formulé un premier vœu pour Paris VIII. « Il y a une baisse », insiste un conseiller de Valérie Pécresse. « Mais les lycéens ont jusqu’au 6 juin pour modifier leurs vœux, donc il peut encore y avoir des élèves qui vont s’inscrire », précise-t-il.

Pour comprendre cet écart entre les différents chiffres, il faut se rappeler la procédure des préinscriptions.

Jusqu’en 2008, elles étaient gérées par le dispositif RAVEL : les étudiants d’Ile-de-France devaient exprimer un double choix. D’un côté, formuler des vœux pour entrer dans une université classique, et de l’autre, formuler des vœux pour les filières « sélectives » comme les classes préparatoires, les BTS et toute formation accessible sur dossier.

Ce système RAVEL a été remplacé cette année par l’Admission post-bac (APB), qui prévoit une seule et unique liste de vœux par personne sur toute la France. Du coup, si, avec RAVEL, un lycéen pouvait demander en premier vœu « sélectif » une classe préparatoire et en premier vœu « universitaire » l’université de Paris VIII, avec la liste unique d’APB, cette université va se retrouver derrière la classe préparatoire.

Et c’est ce qui permet à l’université Paris VIII d’affirmer que les conclusions du ministère se fondent sur des données impossibles à comparer. Le chiffre avancé par le ministère correspond au premier vœu de chaque lycéen dans le système APB et non au premier vœu formulé pour une université. « La comparaison effectuée n’est pas honnête et les chiffres du ministère ne sont pas complets », estime Pascal Binczak, président de l’université Paris VIII. « C’est un subterfuge », dénonce Marie-Louise Azzoug, responsable du service Orientation de Paris VIII. « En 2008, la majorité des étudiants n’avaient déjà pas mis Paris VIII en premier choix, toutes formations confondues », ajoute-t-elle.

Autre incohérence pointée par les responsables universitaires, les chiffres de la licence « sélective » Information et communication de Paris VIII ne sont pas encore connus, ce qui ne permet donc pas la comparaison avec les chiffres globaux de l’année précédente, ainsi que le fait le ministère.

Tout cela ressemble fort à une communication tronquée. « Ce sont des annonces qui font partie d’une campagne de dénigrement à l’égard de quelques universités », a déclaré hier à Mediapart Georges Molinié, président de l’université Paris IV. Une analyse à laquelle Pascal Binczak, président d’université opposé à la réforme voulue par le gouvernement, souscrit.

Portfolio

  • Document Paris 8