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Hamsterisation : 1,6 million d’élèves cobayes de la réforme de la formation des enseignants dès septembre 2010 - Communiqué de SLU (17 février 2010)

jeudi 2 septembre 2010

Attention !
Une fois n’est pas coutume, SLU republie un texte ancien. Il est vrai que l’actualité a enfin rattrapé les analyses faites par la communauté universitaire et enseignante. Un petit oubli cependant dans les articles de presse sur la rentrée : il n’ y a pas uniquement 16 000 profs sans formation, mais 1,6 million d’élèves avec un prof sans formation !

Ce texte est téléchargeable sous forme de tract au bas de la page.

Tout ou presque a été dit sur la réforme de la formation des enseignants, sur sa genèse, sur ses prétendus objectifs et sur ses finalités réelles, sur l’invraisemblable mécano imposé et le rejet massif dont il fait l’objet depuis près de deux ans. Tout ou presque… Une question devait être posée, qui ne l’a jamais été : combien d’élèves seront concernés ?

La réponse apportée ici justifie à elle seule que cessent sans délai les manœuvres, mensonges et menaces ministériels dont le pays et l’ensemble du système d’enseignement, de la maternelle à l’université, paieront le prix.

Pour économiser 16 000 postes de fonctionnaires (voir sur le site du Sénat), le gouvernement a prévu de supprimer l’année de formation en alternance rémunérée dont bénéficiaient jusqu’à présent les nouveaux enseignants après leur réussite au concours.

À la rentrée prochaine, plus de 16 500 jeunes professeurs exerceront à plein temps et en pleine responsabilité sans avoir reçu de formation professionnelle.

Combien d’élèves seront concernés ? Leur nombre est proprement terrifiant.

* Dans les écoles maternelles et élémentaires, ce sont 7 000 nouveaux professeurs des écoles (hors enseignement privé) qui sont attendus, soit 7 000 classes (une sur quarante) et 168 000 élèves qui seront pris en charge par un enseignant à la formation professionnelle tronquée voire inexistante.

* Dans les collèges et les lycées (publics et privés), 9 500 nouveaux enseignants seront affectés. Selon nos estimations (voir détail des calculs en annexe), ce sont au total pas moins d’UN MILLION ET DEMI D’ELEVES, soit plus d’un élève du secondaire sur quatre, qui auront face à eux un enseignant débutant, par exemple 150 000 en mathématiques ou en français, 175 000 en anglais, etc.

On voit par là combien le gouvernement se moque de la réussite des élèves, puisqu’il envisage froidement de les confier à des enseignants sans formation.

Rappelons en outre que le dispositif prévu par les rectorats prévoit un « compagnonnage » assuré pendant les premières semaines par un tuteur (qui ne pourra donc pas s’occuper de ses propres classes au début de l’année scolaire), puis, pour leur délivrer une formation accélérée, de faire remplacer les nouveaux enseignants au 2e trimestre pendant quelques semaines par des étudiants. Ce sont donc deux personnes sans expérience que les élèves concernés verront se succéder au cours de l’année scolaire.

Ce calcul démontre, si cela était encore nécessaire, le caractère profondément néfaste de la réforme de la formation et du recrutement des enseignants voulue par N. Sarkozy.

Au lieu d’améliorer le niveau de l’enseignement en France, cette réforme va l’abattre. Pourquoi le gouvernement s’obstine-t-il à vouloir imposer un projet que tous les acteurs concernés condamnent ? Nous continuons donc à exiger son abandon, l’abrogation des décrets de juillet 2009 et des circulaires déjà publiées. Les reçus aux concours de 2010 doivent bénéficier de la même formation que leurs prédécesseurs. Les concours de 2011 doivent avoir lieu selon les modalités et le calendrier actuels.

Sauvons l’Université !

***

Méthode de calcul utilisée

Nous avons comptabilisé les postes ouverts au recrutement des enseignants (source surle site du MEN), soit :

- les postes des concours d’agrégation dans chaque discipline

- les postes ouverts aux CAPES et 3e concours additionnés aux contrats des CAFEP dans chaque discipline,

- les postes ouverts au CAPET.

- les postes ouverts au CAPLP et les CAFEP correspondants.

(N’ont pas été pris en compte les postes des concours de CPE ou du CAPES de documentation.)

Puis, nous avons fait la moyenne des heures par discipline pour une classe de collège ou une classe de lycée (compte non tenu des classes de Terminale) et à partir de ce chiffre, nous avons estimé le nombre moyen de classes pour un poste d’agrégé (service de 15h hebdomadaires) ou de certifié (service de 18h).

Nous avons multiplié le nombre de postes ou contrats ouverts au recrutement dans chaque discipline par le nombre moyen de classes correspondant.

Puis nous avons multiplié ce résultat par le nombre moyen d’élèves par classe, tel qu’il a été établi par l’INSEE pour l’année 2008-09

(source : INSEE), soit :

Primaire : 24 élèves par classe

Collège : 25 élèves par classe

Lycée : 28 élèves par classe.

Avec les modalités de répartition suivantes :

Nous avons considéré que les agrégés étaient affectés en lycée, ainsi que les certifiés de certaines disciplines (SES, philosophie). Le nombre d’élèves de leurs classes a donc été fixé à 28.

En revanche, nous avons considéré que les professeurs d’arts plastiques et de musique étaient affectés en collège, et compté 25 élèves dans leur classe.

Pour les certifiés des disciplines pouvant être affectées dans les deux types d’établissement, nous avons fait une moyenne correspondant à une répartition de 2/3 de professeurs affectés en collège et 1/3 affecté en lycée, tant pour le nombre moyen de classes par poste, que pour le nombre moyen d’élèves par classe, qui passe à 26.

Le nombre total d’élèves concernés ainsi obtenu suppose que chacun d’entre eux ne se trouve que face à un seul enseignant stagiaire. Cela sera nécessairement le cas dans le primaire où l’enseignant sera affecté à temps plein dans une classe. Pour le second degré, on pourra nous objecter que certains élèves pourraient avoir deux voire trois enseignants stagiaires, ce qui ferait diminuer le nombre de collégiens et de lycéens concernés. Cependant, les établissements veillent à éviter ce type de situation. On ne peut toutefois pas exclure que le ministère joue la politique du pire en concentrant les difficultés dans certains quartiers, mais il prendrait un gros risque de voir la situation devenir explosive.