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Les comptes de Noël de Valérie Pécresse - Véronique Soulé, Libération (Intox / Désintox), 22 décembre 2010

jeudi 23 décembre 2010, par Laurence

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Chaque année, la présentation de son budget est, pour la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Valérie Pécresse, l’occasion d’un hymne à la gloire de Nicolas Sarkozy et des avancées qu’il a permises. A son arrivée en 2007, le Président lui a fixé un grand dessein : mettre en place les universités de demain, capables de se mesurer aux américaines, et faire briller une recherche française trop pâlotte dans les classements internationaux. Pour cela, il a promis une rallonge budgétaire de 9 milliards d’euros sur cinq ans. « Le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche est la priorité des priorités du gouvernement, a encore répété le 30 septembre Valérie Pécresse. L’Etat continue de lui allouer des moyens exceptionnels. »
Le 15 décembre, avec la loi de finances 2011, les crédits du supérieur et de la recherche ont été votés, en hausse de 1,1 milliard d’euros par rapport à 2010. Pourtant, jamais la polémique n’a été aussi virulente. « Budget en trompe-l’œil », « enfumage », dénoncent les syndicats.

Qu’en est-il exactement ? La ministre est une adepte des transparents projetés sur grand écran. D’habitude, ils permettent de simplifier. Mais, pour comprendre son budget, ils compliquent et l’on s’y perd. On y voit des flèches et des figures de couleurs, avec des chiffres mêlant des crédits budgétaires, des autorisations d’engagement qui ne sont que des promesses, du crédit impôt-recherche, des intérêts de capitaux placés, etc. Les syndicats ou la fondation Terra Nova, qui fait une analyse sévère du budget, dénoncent toutes ces additions qui n’ont pas lieu d’être. Certains, refaisant les calculs, concluent, au mieux, à une stagnation du budget.

Pour tenter d’y voir clair, on s’en tiendra à trois exemples. D’abord les crédits pour la « vie étudiante ». Valérie Pécresse annonce 71 millions d’euros en plus en 2011, notamment pour le plan licence, destiné à mieux encadrer les premières années. Mais pour les deux principaux syndicats étudiants, l’Unef et la Fage, le compte n’y est pas. Il manque de quoi financer le dixième mois de bourse promis par Nicolas Sarkozy. Pour démarrer, un demi-mois avait été versé à la rentrée. Mais, dès l’an prochain, les boursiers devaient toucher un dixième mois complet. Or la ministre n’a apparemment compté qu’un demi-mois en 2011. L’Unef estime le manque à 95 millions d’euros.

Second exemple, le plan campus, un grand projet présidentiel pour rénover l’immobilier universitaire. Parmi les moyens supplémentaires, le budget 2011 fait état de 270 millions d’euros. Mais cela ne signifie pas que cet argent sera versé et dépensé. En effet, ces 270 millions sont les intérêts d’une dotation de 5 milliards d’euros placés dont les universités ne touchent que le rendement. Et les projets doivent être réalisés au travers de partenariats public-privé (PPP) - le privé finance les travaux, l’université lui verse ensuite un loyer avec ces intérêts. Or ces partenariats sont longs à monter. Et très peu sont prêts.

La recherche enfin. Le budget affiche une hausse de 412 millions d’euros en 2011. Mais de quoi parle-t-on ? Pour un tiers, celle-ci provient du crédit impôt-recherche (145 millions d’euros). Par ce dispositif, les entreprises déduisent une partie de leurs investissements de recherche de leur impôt. Les syndicats de chercheurs dénoncent un cadeau fiscal aux entreprises, qui profite avant tout à la recherche privée et appliquée, alors que la recherche fondamentale reste pauvre. La ministre fait alors miroiter les 3,6 milliards d’euros du grand emprunt, qui devraient aller dès 2011 à des projets « d’excellence ». Mais tous ne partent pas avec des chances égales.

« Le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche est la priorité des priorités du gouvernement. L’Etat continue de lui allouer des moyens exceptionnels. »