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Camille Noûs, scientifique fantôme à l’insolent succès - David Larousserie, Le Monde, 29 mars 2021

mercredi 31 mars 2021, par Elie

Ce polymathe est un auteur fictif, inventé par un collectif de chercheurs français qui entend, en imposant sa signature, dénoncer symboliquement les travers de l’évaluation de la recherche par le nombre de publications.

Vie des labos. Quel chercheur ou chercheuse de France n’apprécierait pas de lire, le jour de son anniversaire, une mention de son travail dans la célèbre revue Science ? Même si c’est dans les pages d’actualité de ce journal, plutôt que dans les pages publiant des travaux de recherche originaux. L’heureux événement vient d’arriver le 16 mars à Camille Noûs, mais avec un titre intrigant : « Qui est Camille Noûs ? »

Un génie sans aucun doute, tant sa production, validée par les revues scientifiques, touche des branches très variées allant de la physique des particules aux sciences sociales en passant par les maths, l’informatique, la chimie ou la biologie. Tant, aussi, l’auteur est prolifique, avec 180 articles publiés dans 110 journaux. Ce qui est davantage, en France, que les impressionnants records pour une seule année des médecins Guido Kroemer (79 articles) ou Laurent Peyrin-Biroulet (119), mais moins que le professeur Didier Raoult (228), selon la base de données Scopus.

Autre trait de caractère notable et rare dans ce monde si sérieux, l’humour : Camille Noûs n’existe pas et est membre d’un laboratoire imaginaire, Cogitamus. C’est un auteur allégorique, inventé le 20 mars 2020 par un collectif de chercheurs militants désireux notamment de rompre « avec la rhétorique de la trouvaille géniale et solitaire qui justifie le marketing de soi-même, la course au chiffre, l’évaluation à l’impact et la mise en concurrence des scientifiques ». Bref, un acte symbolique pour dénoncer les travers des modes actuels de publication, d’évaluation, de recrutement…

« La publication scientifique, en vingt ans, est devenue moins une unité de connaissance qu’une unité comptable, qui sert à évaluer », rappelle Yves Gingras, professeur d’histoire et de sociologie des sciences, directeur scientifique de l’Observatoire des sciences et des technologies à l’université du Québec à Montréal, et qui suit « cette initiative très intéressante ».

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