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Grève des loyers d’étudiants lillois contre le délabrement de leurs résidences, par Emilie Legendre, Le Monde, 25 février 2010

vendredi 26 février 2010

La vie de Maxime tient dans un 9 m2. Une chambre remplie à ras bord, un joyeux capharnaüm. Sur l’étagère, bouquins et gel douche côtoient poêle à frire, poivrier et salière. Etudiant en master biologie et environnement, Maxime habite depuis quatre ans la résidence Galois, l’une des plus délabrées du campus de Villeneuve-d’Ascq, une commune du Grand-Lille. Il a mis de côté son loyer de février et ne le versera au Crous de Lille que "si les choses bougent".

Depuis mi-janvier, il suit l’appel à la grève des loyers de la Fédération des étudiants en résidence universitaire de France (Féruf, proche de l’UNEF), de l’Union des étudiants communistes, de membres de l’UNEF et de la CGT-Crous. Comme 400 autres étudiants, répartis dans les résidences Galois, Camus, Chatelet et Van Der Meersch du Grand-Lille. Un chiffre que Martine Muller, la directrice du Crous de Lille, ne peut confirmer.

Situés sur le campus de Lille-I, quatre des cinq bâtiments de la résidence Galois, dont celui de Maxime, n’ont jamais connu de travaux de rénovation lourds. Ils datent pourtant de 1965. A l’extérieur, les façades sont délavées, noircies. Une fois passée l’entrée, ménage et travaux quotidiens ne parviennent plus à cacher la misère. Etage après étage, la même peinture effritée, la même humidité, les mêmes douches auréolées de taches vertes tirant sur le marron. Sur les 700 chambres que compte la résidence, 100 restent fermées. Impossible de les louer.

En plus des cafards, des sanitaires insalubres, du chauffage insuffisant, de la connexion Internet aléatoire, Maxime se plaint de la fenêtre dont le cadre laisse passer l’air, et est un véritable nid à moisissures. "Je dois gratter régulièrement le tour de la fenêtre si je ne veux pas que les traces se répandent jusqu’à mon lit..." Malgré l’état de la chambre, le loyer a augmenté, comme chaque année, à la rentrée 2009 : il s’élève à 136 euros, avant le versement de l’aide au logement qui le ramène à 90 euros.

Pour Ugo Bernalicis, vice-président étudiant (UNEF) du Crous de Lille, et Pierre Tribout, responsable local de l’Union des étudiants communistes, la déliquescence des bâtiments est un signe du "désengagement de l’Etat". Un signe de non-engagement plutôt. Mme Muller reconnaît que, durant des années, les résidences du Crous n’ont pas été entretenues. Avec ses 150 000 étudiants, dont 49 000 boursiers, l’académie de Lille est une des plus importantes. Le Crous y gère un parc de 9 251 chambres réparties dans 38 résidences. Seulement 6 % des étudiants de l’académie y trouvent à se loger, contre 7 % au niveau national.


"RELOGEMENT"

Si les étudiants ne le ressentent pas encore, les choses sont en train de changer. "Depuis trois-quatre ans (et la mise en place du plan Anciaux de rénovation des logements étudiants), l’Etat intervient et, nouveauté, la communauté urbaine de Lille devrait participer au budget des résidences", souligne la directrice du Crous.

Depuis 2005, 1 800 logements ont été réhabilités et seulement 260 logements neufs sont sortis de terre. Mme Muller avoue être freinée par les délais de construction, en moyenne de trois ans : "Même avec plus de crédits, on ne peut pas réhabiliter plus de 300 à 400 logements par an. Au-delà, nous rencontrons un problème de relogement de nos étudiants."

Prévue depuis 2007, la rénovation de la résidence Châtelet va débuter cette année. Un des bâtiments de Galois devrait voir également ses sanitaires remis en état. En outre, le "plan campus" de Lille prévoit 20 millions d’euros pour financer de nouveaux logements. Reste que, selon Mme Muller, la grève des loyers n’intervient pas innocemment. Les élections des représentants étudiants au conseil d’administration du Crous auront lieu le 23 mars.


Voir en ligne : Le Monde