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Une composante clé du tissu régional francilien, par Gaston Collin, chercheur à l’université d’Orsay, candidat du Front de Gauche aux Élections régionales (L’Humanité, 2 mars 2010).

jeudi 4 mars 2010

Quelle riposte à la casse de la recherche et de l’Université ?

Un constat irréfutable  : l’université française a su développer, au milieu des pires difficultés, une réelle aptitude à relever le défi d’un afflux massif d’étudiants tout en préservant une capacité de recherche de très haut niveau. Et, contrairement aux assertions de M. Sarkozy relayées par Mme Pécresse, à la fois ministre en charge du secteur et tête de liste UMP en région, les obstacles rencontrés n’ont jamais relevé d’une incapacité structurelle mais d’un affligeant manque de moyens en enseignants, en locaux, en logements étudiants, en financements. Dans notre région, le problème se pose de façon aiguë du fait d’une concentration d’universités et de recherche unique  : 
six cent mille étudiants, dix-sept univer-
sités, des centaines d’écoles d’enseignement supérieur, dont les plus prestigieuses, 40 % de toute la recherche et, avec dans tous les domaines, des équipes internationalement reconnues.

C’est une composante essentielle du tissu régional tant pour délivrer une formation supérieure au plus grand nombre que par ses implications  : niveau et qualité des emplois, innovation et développement économique, préparation citoyenne consciente et éclairée sur les grands enjeux environnementaux et de cadre de vie. Sarkozy et Pécresse annoncent vouloir « mettre les universités au cœur de la recherche et du processus de transferts de technologie ». Traduisons  : la finance estime que d’entretenir des secteurs de recherche et développement rogne trop sur les profits. Ceux qui douteraient peuvent utilement se référer aux pratiques des trois grands groupes qui pilotent les grands pôles de compétitivité, Thales (System@tic), Sanofi (Medicen), Renault (Moveo)  : tous trois liquident leurs secteurs de recherche. Et ce dans le cadre des 5,8 milliards de crédit impôt recherche en 2009. À quoi bon maintenir des structures recherche-développement puisque les universités vont se charger du travail  ?

Quant à la manipulation du « grand emprunt », Sarkozy encore  : « Nous allons
consacrer 7,7 milliards d’euros, pour 
doter en capital (souligné par nous) cinq à 
dix campus d’excellence. Les 7,7 milliards seront donc versés sous forme de capital (non consomptible) dont seuls les intérêts seront disponibles. » En bons du Trésor (titres du grand emprunt), au mieux ces intérêts seront de l’ordre de 4 %, soit donc 300 millions d’euros par an, mais à répartir sur au moins dix sites. Vertigineux coup de pub  !

Qui plus est, les grands oubliés de tout ce train de mesures sont les étudiants. Une majorité d’entre eux ont des conditions de vie et d’étude indignes d’une région qui s’affiche orgueilleusement comme l’une des plus riches du monde. Dans ce qu’on nous annonce, rien de significatif n’est mis en œuvre pour remédier au scandale du logement étudiant et à la galère de ceux qui sont contraints de travailler pour financer leurs études, première raison du taux d’échec. Sans parler des conditions d’études souvent à la limite de la décence.

Toutes les opérations en cours, plateau de Saclay, Condorcet, la Défense, Paris-Centre, Quartier latin, sont inscrites dans le volet « développement économique » du fameux Grand Paris mis en sourdine pendant la campagne tellement il est cynique. Le projet est exposé sans vergogne dans le trajet du « grand métro »  : universités concurrentielles sélectives (frais d’inscriptions qui explosent) dans Paris-Centre, quelques pôles dits d’excellence reliés par le nouveau métro en périphérie, pôles où le patronat parlera en maître. Pour le reste, des universités sans recherche pour l’abattage de formations au rabais débouchant sur la précarité sous-payée que veulent généraliser Mme Pécresse et ses mandants.

Le Parti communiste et le Front de gauche sont porteurs d’une autre vision pour l’université et la recherche. Services publics, ils sont et doivent le rester. Leur double mission  : formation – donner au plus grand nombre une capacité d’indépendance créatrice et citoyenne – et recherche – être à la pointe de la production des connaissances nécessaires pour se mesurer aux difficiles enjeux de ce XXIe siècle. C’est ce dont notre région a besoin impérativement. Il ne s’agit pas d’un débat académique de spécialistes. Cette question concerne tous les Franciliens car s’y joue l’avenir de l’organisation régionale avec ses conséquences sur l’emploi, les transports, la politique de logement, le cadre de vie.


Voir en ligne : L’Humanité