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A Jussieu, « on n’est pas encore en mesure de bloquer la fac », Libération, 12 octobre 2010

mardi 12 octobre 2010

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« Moi, comme revendication, je propose le retrait total de la réforme des retraites. C’est une vaste arnaque, au bout d’un moment faut arrêter de déconner », s’emballe François, au premier rang. Ils ne sont pas très nombreux ce mardi matin dans l’amphi de la fac Paris VII, tout près de la bibliothèque François Mitterrand, à Paris. Une soixantaine tout au plus.

« C’est clair que là, on n’est qu’au début de la mobilisation des étudiants, va falloir continuer à distribuer des tracts à l’entrée des amphis... Mais faut être réaliste, on n’est pas encore en mesure de bloquer la fac. Y a encore du travail », enchaîne un autre étudiant, deux rangées plus loin.
« Casse sociale plus profonde »

« Bon, si les gens veulent parler, j’écris leur nom au tableau », entend-t-on dans un brouhaha, dû surtout au bruyant système de ventilation. C’est au tour d’Augustin de pousser sa gueulante : « Cette réforme casse la solidarité pour mettre en place le chacun pour sa gueule. » John, du NPA, embraye à la vitesse d’une mitraillette. On attrape au vol : « Un des éléments fondamentaux à avoir en tête, c’est la casse sociale plus profonde qui dépasse bien largement la question des retraites. »

Intervient Patricia, un autocollant CFDT sur la poitrine. Elle fait partie de l’intersyndicale qui rassemble les salariés des bureaux du coin. Un peu intimidée de se retrouver face à « des jeunes », elle lance : « C’est juste pour vous inviter à venir manger avec nous et réfléchir à des slogans... Je suis sûre que vous avez plein d’idées, on pourra les crier à votre place cet après-midi si ça vous gêne. D’ailleurs, on serait ravis de vous emmener avec nous à la manif. » Et de distribuer une pile de photocopies, où on trouve tout en bas : coupon-réponse « vos slogans revendicatifs », étant précisé qu’une « surprise » récompensera la meilleure trouvaille.

La voix posée -au début-, Quentin, du mouvement des jeunes socialistes, rappelle la priorité du jour : passer du soutien passif à une vraie mobilisation des jeunes. Il s’enflamme : « C’est quand même extraordinaire. Avec cette réforme, encore une fois, le gouvernement sucre nos droits à la retraite sur notre dos et il a le culot de dire que c’est pour notre bien. »
Jouer l’effet de masse dans les cortèges

Comment mobiliser ? Au tableau, un étudiant écrit avec application, à côté de la colonne revendications, les « perspectives du mouvement ». Lues dans le désordre : faire un petit discours en début de chaque TD pour convaincre les autres qu’il faut se bouger et que les autres facs sont mobilisées, organiser une nouvelle AG dès demain, aller manifester devant le Sénat jeudi midi, etc.
« Surtout, surtout, il faut qu’on reste tous ensemble à la manif cet après-midi, c’est hyper important », s’accordent certains.

L’organisation du mouvement, trois semaines tout juste après la rentrée, n’est pas encore calée. Dans les rangs, circule un gobelet à bière en guise de caisse collective, pour payer les photocopies des tracts, les feutres pour les banderoles... « D’ailleurs, lance un manifestant, ce serait pas mal que l’un de nous soit une espèce de trésorier ? ».