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Colloque du Sénat : Un pas vers la privatisation de l’Ecole ? (Café Pédagogique, François Jarraud, 5 mai 2011)

jeudi 5 mai 2011, par Mariannick

Organisé par la "Mission d’information sur l’organisation territoriale du système scolaire et sur l’évaluation des expérimentations locales en matière d’éducation" du Sénat, le colloque du 4 mai est le dernier événement avant la remise du rapport final de la Mission fin juin. On en retiendra surtout la fin : la révélation, par un organisme inconnu mais invité par la Mission, d’une étude qui affirme que le coût d’un élève est nettement plus onéreux dans le public que dans le privé du fait d’une gestion publique "laxiste". De là à conclure sur la nécessaire privatisation du système éducatif, il n’y a qu’un pas. La Mission le franchira-t-elle ?

Faut-il privatiser l’École française ? Commençons le colloque par sa fin, retentissante. La dernière intervention du colloque a été celle d’Agnès Verdier-Molinié, présidente de l’IFRAP. Cette obscure association se présente comme un thinktank libéral. Mais il semble surtout actif en période électoral et ressemble davantage à un groupe politique. Les publications de l’Ifrap donnent la tonalité de la maison : "Les fonctionnaires contre l’État, le grand sabotage", "Cet État qui tue la France", "le dossier noir de l’ENA".. L’Ifrap est libérale au sens classique (ou américain), c’est-à-dire hostile à l’Etat. Agnès Verdier-Molinié a publié des statistiques qu’elle était incapable de définir précisément, qu’elle présentait comme sérieuses mais exactes "à 1000-1500 euros près". Selon l’Ifrap, un élève du privé coûterait au primaire 3 443 € par an contre 5 469 dans le public. Dans le second degré on aurait 7201 et 9989 € (dépenses immobilières et parentales incluses). De plus de très forts écarts existeraient entre régions et départements. Ainsi le Limousin dépenserait 4 374 € pour les élèves du public et 585 pour ceux du privé. Un élève du public coûterait 1 478 € dansle Cher et 375 dans le Loir-et-Cher. Comment expliquer tout cela ? Selon l’Ifrap, la décentralisation est à revoir, "elle a conduit à des pertes d’économie d’échelle". Mais il y a aussi les fonctionnaires. "L’éducation est trop centralisée et a des normes de dépenses laxistes laissées à la discrétion des décideurs". Si l’éducation est trop centralisée et que les collectivités locales sont dépensières, alors on peut en déduire qu’on peut décentraliser jusqu’à l’établissement autonome. C’est sans doute ce modèle que défend l’Ifrap : la privatisation de l’éducation nationale. A noter que les "décideurs" de l’Etat sont bien laxistes : aucun des deux recteurs présents dans la salle n’a répliqué.

L’école privatisée en modèle. Or c’est justement le système éducatif le plus décentralisé et privatisé que la Mission avait choisi de montrer en invitant un inspecteur et un directeur de réseau d’écoles néerlandais. Aux Pays-Bas, la constitution donne le libre choix de l’école aux parents. L’État fixe ce qui doit être appris. C’est chaque école qui dit comment il faut apprendre et qui définit ses propres enseignements et règles. Ce "modèle" néerlandais a été présenté comme un exemple de réussite en oubliant à quel point il se structure sur une base ethnique de plus en plus accentuée.

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