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Le budget des universités pour les nuls, tribune du groupe Marc Bloch, Libération, 16 décembre 2011

samedi 17 décembre 2011, par Sylvie

Le groupe Marc Bloch réunit 59 présidents, directeurs d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche, ainsi que des hauts fonctionnaires.

S’il y a quelque chose de certain concernant le budget des universités, c’est que plus personne n’y comprend rien ! Un drame en trois actes s’est déroulé sous nos yeux.

Acte I : Abondance.

La loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) est votée avec son cortège de moyens : plan licence, plan campus et plus tard grand emprunt. Mieux encore, le Premier ministre promet un plan d’augmentation d’un milliard par an, pendant cinq ans, du budget de l’enseignement supérieur, et un autre plan du même ordre pour la recherche.

Acte II : Promesses non tenues.

Les milliards promis ne sont pas au rendez-vous, le plan licence se dissout, pis : une commission parlementaire dirigée par la droite s’aperçoit que, sur les 5 milliards promis, seuls 50 millions ont été versés trois ans après ! C’est un rapport de 1 sur 100.

Acte III : La descente aux enfers.

Le ministre rend public une liste de 8 universités en déficit devant passer sous gestion rectorale. D’autres ne peuvent faire face aux coûts salariaux transférés (et sous-évalués). C’est la fin de l’autonomie et le début de la mise sous tutelle.

Comment en est-on arrivé là ? Les présidents des universités ont-ils dilapidé les milliards promis ? Non, bien sûr ! Nous payons le prix des promesses imprudentes et d’une politique de communication qui confond l’effet d’annonce et la traduction en actes des nécessités de gestion.

Une université, ce sont des étudiants auxquels on doit donner une formation et un passeport pour l’emploi. Comme il s’agit d’une formation universitaire, elle doit s’adosser à une recherche qui n’existe qu’au niveau international. Pour réaliser cela, il faut des moyens aux standards mondiaux et d’abord des enseignants et des chercheurs (mais également des personnels administratifs et techniques), donc des emplois. Il faut aussi des bibliothèques, des salles de cours et l’accès aux technologies de l’information et donc remettre à niveau des bâtiments dont la majorité a été construite dans les années 70 (quand ce ne sont pas des « monuments historiques ») et pas ou peu rénovés depuis.

La France dépense historiquement moins pour ses étudiants que la moyenne des pays de l’OCDE. Pis, elle concentre ses moyens sur des filières qui n’ont pas de reconnaissance internationale et peu ou pas de recherche : classes préparatoires, grandes et petites écoles, etc. Or le standard international c’est la formation par la recherche et la recherche c’est… l’université !

En période de crise, plus qu’à tout autre moment, il faut investir dans l’avenir et dans la compétitivité internationale d’une nation. Il n’y a pas de secret : pour former les cadres de demain, les inventeurs des nouvelles technologies, les ingénieurs, les commerciaux qui nous permettent de concevoir, de créer, de fabriquer et d’exporter des richesses, il faut investir dans notre jeunesse et lui permettre de déployer sa créativité. C’est la seule solution pour maintenir notre économie à flot.

Pour cela, il est indispensable que nos étudiants reçoivent une formation aux plus hauts standards internationaux. Il faut plus d’enseignants pour en finir avec les amphithéâtres surchargés, il faut des bâtiments dignes de ce nom (et donc ne pas distribuer 1% des sommes promises), il faut une recherche compétitive et donc en finir avec les coupes claires dans les budgets des universités et de la recherche. Investir dans l’avenir ne doit pas être un slogan, nous demandons des actes.

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