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Président(e)s d’université : cherchez les femmes..., Véronique Soulé, Blog "C’est classe !", Libération, 2 avril 2012

mercredi 4 avril 2012, par Sylvie

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Question parité, les élections qui se déroulent en ce moment à la tête des universités sont une catastrophe : pas une femme élue pour l’instant... Une conclusion s’impose : sans quota, point de salut !

2012 est une année électorale importante aussi pour les universités. La moitié d’entre elles renouvellent leur présidence d’ici juin. A mi-parcours, le bilan est déjà désastreux : sur la vingtaine de scrutins passés, rien que des hommes.

Les femmes n’étaient déjà que 11 sur quelque 80 universités (sans compter les PRES, les écoles normales, d’ingénieurs, les instituts, etc).

Même si l’avenir réserve de bonnes surprises, il est d’ores et déjà acquis qu’elles seront encore moins. Le plus probable est même qu’on les comptera sur les doigts d’une main. Un bref décompte pour le prouver :

- sur les 11 présidentes, 5 ne pouvaient pas se représenter, ayant déjà effectué deux mandats successifs, ou ne le voulaient pas. Dans les 3 élections qui ont déjà eu lieu, elle ont toutes été remplacées par des hommes :

. Françoise Moulin Civil, à la tête de l’Université de Cergy-Pointoise, a cédé la place à François Germinet le 21 mars ,

. Nadine Lavignotte, à la tête de l’Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand II, a cédé la place à Mathias Bernard le 22 mars,

. Simone Bonnafous, à la tête de de l’Université Paris-Est-Créteil, a cédé la place à Luc Hittinger le 8 mars,

- Bernadette Madeuf, qui se représentait à la tête de l’Université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense, a, elle, abandonné la course le 21 février, les listes la soutenant n’ayant obtenu que deux siège au conseil d’administration ; son probable successeur est Jean-François Balaudé, un homme donc

- Sophie Béjean, la présidente sortante de l’Université de Bourgogne, est en sérieuses difficultés. Lors des élections au CA le 15 février, sa liste a été devancée par celle de son concurrent, Alain Bonnin (une intersyndicale a déposé ensuite un recours au tribunal administratif pour contester la validité des résultats)

- Sur les 6 autres présidentes sortantes, une seule paraît aujourd’hui sûre de l’emporter : Anne Fraïsse, à Montpellier III Paul-Valéry, qui est par ailleurs vice-présidente de la Conférence des présidents d’université (CPU). Le 15 mars, sa liste a très nettement devancé la liste concurrente qui, du coup, a renoncé à présenter un candidat à la présidence lors du scrutin le 24 avril.

Quant aux 5 restantes, c’est l’incertitude. Mais il faut être réaliste : parmi elles, 2 présidentes ne se représentent pas et jusqu’ici, on a vu que chaque fois, c’étaient des hommes qui leur succédaient.

- Pour être complète, il faut ajouter une probable nouvelle élue à la tête de l’Université de Limoges : Hélène Pauliat, seule femme pour l’instant à prendre la relève d’un homme, Jacques Fontanille qui ne se représentait pas. Sa liste est arrivée nettement en tête au CA et elle devrait être élue à la présidence le 20 avril.

Parmi les explications avancées à cette bérézina, les raisons habituelles :

- les présidents d’université ont plus de pouvoirs avec la LRU (la loi sur l’autonomie). Le poste devient dès lors plus prestigieux et attractif. Et les hommes accourent.

- les femmes s’autocensurent, trop modestes, peu sensibles au pouvoir et aux honneurs, ou encore redoutant de ne pouvoir tout concilier - les tâches domestiques, les enfants, etc.

- mécaniquement, elles ont moins de chances : les femmes ne constituent que 20% des professeurs, contre 41,5% des maîtres de conférences (l’échelon en dessous). Or les présidents se recrutent essentiellement parmi les professeurs - cette année, on observe une arrivée en force des médecins (PU-PH, professeurs d’universisté-praticiens hospitaliers) mais c’est une autre histoire.

Les responsables universitaires se disent sensibles à ce problème de sous-représentation des femmes plus on monte dans la hiérarchie. Le 14 juin 2011, Vincent Berger, le président de Paris-Diderot très en pointe sur la question, a fait adopter "un plan d’action" pour favoriser l’égalité hommes femmes dans son établissement.

Le 23 juin 2011, la CPU a adopté à son tour une motion en faveur de l’égalité. La CPU "souhaite que les universités se dotent de conseils proches de la parité", y lit-on, avec "des listes comprenant des femmes et des hommes en position alternée pour les élections aux trois conseils centraux". La CPU rappelle ensuite la loi du 27 janvier 2011 sur l’équilibre femmes-hommes au sein des CA et demande à la Ministre de l’époque Valérie Pécresse de modifier le décret électoral en ce sens. Mais Valérie Pécresse, bien que femme, n’a rien fait.

Décidément, une conclusion s’impose : sans quota, point de salut !