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Voile à l’Université ?? Août 2013 (MàJ le 22 août 2013)

jeudi 22 août 2013, par Mariannick

Pourquoi l’interdiction du voile à l’université n’aurait aucun sens

Tribune de Samim Bolaky dans Rue89

La question du port du voile reste d’une actualité brûlante en France à l’heure où un sondage publié par le Figaro révèle qu’« une majorité de français est contre le voile islamique à l’université ». Ce sondage fait suite à un rapport du Haut Conseil à l’Intégration (HCI) préconisant l’interdiction de signes religieux ostentatoires dans les salles de cours de l’université.

Le ministre de l’Intérieur a déclaré au Figaro trouver que l’ensemble de ces propositions du HCI sont « dignes d’intérêt », et qu’il faudrait mettre de la « cohérence » dans ce type d’institutions.

Cette interdiction serait-elle possible ? A-t-elle une assise juridique ? Quel est l’état de la législation en la matière ? […]


Voile à l’université : Jean-Loup Salzmann s’indigne du rapport du HCI

Imane Youssfi, Bondyblog, 13 août 2013

En plein mois d’août, le rapport du Haut conseil de l’intégration (HCI) préconisant l’interdiction du port du voile dans les universités a emballé la sphère médiatique. C’est le quotidien Le Monde, qui a donné le la en la mettant en Une mardi dernier. Sur un ton direct et bref, Jean-Loup Salzmann, Président de la conférence des présidents d’université (CPU) et président de l’université Paris XIII, ne mâche pas ses mots pour expliquer son opposition au rapport du HCI. Entretien.

Quel est votre avis concernant le rapport du HCI, qui a fait la Une du journal Le Monde cette semaine ?

Je pense que c’est une opération de communication qui utilise le fait que c’est le mois d’août, qu’il n’y a pas beaucoup d’information, pas beaucoup de grain à moudre pour les journalistes.

Que pensez-vous de l’idée de légiférer pour interdire le « port du voile » aux jeunes filles dans les universités ?

Personnellement, je pense que c’est une très mauvaise idée. Tout d’abord parce qu’il n’y a pas de demandes des universités, ensuite parce qu’il n’y a pas de problèmes. Je ne vois vraiment pas l’intérêt de faire une loi quand il n’y a ni demande, ni problème.

Vous êtes aussi président de la faculté de Paris XIII-Nord Villetaneuse. Avez-vous déjà rencontré des difficultés avec ces jeunes filles qui ont la tête couverte ?

Des problèmes, on ne peut pas vraiment dire, ce sont elles, parfois, qui rencontrent des soucis, par exemple pour trouver un stage. Mais dans ces cas-là on essaye de les aider.

Si l’Etat légifère, quelles conséquences cela pourrait-il avoir dans les universités françaises ?

Il n’y aura pas de conséquences car l’Etat ne légiféra pas.

Mais concrètement, aujourd’hui, quelles sont les difficultés auxquelles sont confrontées les universités et qui mériteraient que l’Etat légifère ?

Nous avons beaucoup de problèmes dans les universités aujourd’hui. Tout d’abord des problèmes de moyens. Nous n’avons pas assez d’argent pour accueillir tous le monde. Des problèmes d’orientations, pour aider les étudiants à s’inscrire dans des filières. Des problèmes de réussite en licence où il y a beaucoup d’échec et enfin, des problèmes d’insertion professionnelle. Ce sont de vrais problèmes qui méritent que l’on s’attarde dessus, pas des faux problèmes qui ne concernent que trois ou quatre personnes.

Imane Youssfi


A propos du débat sur le voile islamique à l’Université : La Libre Pensée exige le respect des franchises universitaires !

Blog de Médiapart, 13 août 2013

Le Haut Comité à l’Intégration, qui est politiquement actuellement en situation de coma dépassé, a cru devoir, une nouvelle fois, jeter une pierre antimusulmane dans le jardin de son strabisme « laïque ». Pour le HCI, tout ce qui peut ressembler à un palestinien, arabe, musulman doit être vilipendé et voué à la Géhenne. Coutumier du fait, l’action du HCI ne vise visiblement pas à trouver des solutions, mais plutôt à favoriser les affrontements communautaristes. C’est pourquoi, la Fédération nationale de la Libre Pensée l’a dénommé à plusieurs reprises « le Haut Conseil à la désintégration républicaine. »

Une nouvelle fois, on nous ressort la question du voile islamique et là, à l’Université. Pour la Libre Pensée, il ne saurait y avoir qu’un type d’université : publique et républicaine en conformité avec la loi de 1880 qui n’autorise le titre d’Université qu’aux facultés de la République. Et cela impose le monopole de la collation des grades qui interdit, malgré le processus de l’Union européenne dit « de Bologne », d’attribuer le titre de diplômes d’Etat à des « certificats » de type religieux, patronal ou privé.

Dès que les Universités ont pris une place importante, se détachant de l’emprise du pouvoir royal et religieux, dès le Moyen-âge, ont été conquises les franchises universitaires qui ont voulu faire des universités un havre de paix, de recherche et d’étude. Ces libertés démocratiques ont été les moyens et le corollaire de la libre recherche dans les études.

Ce sont ces franchises universitaires qui interdisent l’entrée des forces de police dans les facultés. Celles-ci ne peuvent pénétrer dans les facultés qu’à la demande expresse des responsables de l’Université. Les questions de discipline et d’interdits sont réglées par la franchise juridictionnelle interne aux universités qui organise la légalité du pouvoir disciplinaire.

Vouloir interdire le port de vêtements religieux, ou autres, au sein des universités ; c’est remettre en cause une liberté démocratique pluri-centenaire.

C’est attentatoire aux libertés universitaires. C’est la porte ouverte pour l’entrée des forces de police dans les campus pour « contrôler l’application des lois ». Rappelons qu’un régime s’est particulièrement distingué par la remise en cause des franchises universitaires : celui du généralissime Franco en 1968. Triste référence pour nos liberticides antimusulmans aujourd’hui.

Le retour de Raymond Marcellin

Cela a toujours été une préoccupation des Ministres de l’Intérieur de surveiller, contrôler, réprimer les étudiants. S’il est un modèle qui semble « inspirer » l’actuel Ministre de l’Intérieur, c’est, sans doute, plus celui de Raymond Marcellin (ministre de l’intérieur de mai 1968 à février 1974) que celui de Nicolas Sarkozy. On a les modèles que l’on peut. Toute interdiction d’une liberté pour quelques-uns, c’est toujours une interdiction qui finira par s’imposer à tous.

Le Ministre actuel de l’Intérieur est lui aussi victime d’un curieux strabisme politique. Il a été saisi à plusieurs reprises par la Fédération nationale de la Libre Pensée sur le problème des gendarmes qui sont quasiment contraints de participer, es-qualité et en uniforme, aux cérémonies religieuses pour la plus grande gloire de sainte-Geneviève et rien n’a changé. De même, le Ministre n’a toujours pas supprimé les dispositifs antilaïques des conférences départementales « sur la liberté religieuse » mise en place par son prédécesseur de droite.

Malgré des demandes réitérées de rencontre sur ces deux problèmes, Manuel Valls refuse toujours de recevoir la Libre Pensée. Sa préoccupation essentielle semble donc être l’Islam où il manie un jour la carotte au moment du Ramadan et tous les autres jours, c’est le bâton.

Il serait utile que les pouvoirs publics tirent un véritable bilan de tout l’arsenal liberticide en direction des musulmans pour s’apercevoir que l’on va droit dans le mur des affrontements communautaristes et que toutes les lois, décrets et règlements contre les vêtements dits « religieux » sont totalement contreproductifs.

La seule solution : le respect intégral de la loi de 1905 !

Il est plus que temps de revenir à la notion de stricte Séparation de la sphère privée et de la sphère publique par une réelle application de la loi du 9 décembre 1905 de Séparation des Eglises et de l’Etat.

Le respect absolu de la liberté de conscience par les pouvoirs publics est une exigence démocratique, républicaine et laïque qui, seule, peut nous éviter les affres des affrontements communautaristes fomentés par des liberticides honteux. C’est le sens de l’action de la Libre Pensée.

Pour la défense de la loi de 1905 et la laïcité institutionnelle

Pour la liberté absolue de conscience :

Respect des Franchises universitaires !


Les affligeantes leçon d’histoire du HCI


Voile à l’université : encore un sondage très ambigu

Michaël Hajdenberg, Mediapart, 9 août 2013,

Selon un sondage IFOP placé en Une du Figaro, 78 % des Français seraient opposés au port du voile à l’université. Valls embraye. Les médias entretiennent le débat sur une possible interdiction. Mais une fois de plus, la construction du questionnaire explique en partie le résultat. Décryptage.

Attention, prévient l’IFOP dans la note méthodologique de son sondage du jour. Au vu du nombre de personnes interrogées, il y a une marge d’erreur dans les résultats de son enquête, qu’elle évalue, selon des critères scientifiques, à 2,5 points.

Si ça se peut, nous dit en substance l’institut de sondage, ce ne sont pas 78 % des Français qui sont opposés au port du voile à l’université, comme le titre Le Figaro. Mais 75,5 % ou 80,5 %.

À y regarder de plus près, et comme toujours avec les sondages (voir notre dossier à ce sujet), il se pourrait cependant que la marge d’erreur soit beaucoup plus importante. Ou plus exactement qu’on fasse dire aux « Français » quelque chose qui ne reflète pas précisément leur pensée.

En début de semaine déjà, le débat sur ce thème était parti d’un rapport du Haut conseil à l’intégration dont le contenu avait été préalablement enterré... (lire notre article à ce sujet). Cette fois, grâce à un chiffre choc, Le Figaro maintient dans l’agenda public une question qui, a priori, ne génère pas nécessairement d’insomnies parmi la population, ni même parmi le lectorat du journal.

Sollicité par le quotidien en réaction, le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, estime que la récente proposition du Haut conseil à l’intégration d’interdire le voile à l’université est « digne d’intérêt ». S’il pensait le contraire, oserait-il dire à 80 % de la population qu’elle s’intéresse à des sujets sans intérêt ?

Manuel Valls devrait pourtant prendre cette étude avec prudence. Car, grand classique du sondage, la question dicte en partie les réponses. L’interrogation posée n’est pas :

– Personnellement, êtes-vous favorable, opposé ou sans opinion sur la nécessité de faire une loi qui interdirait le port du voile ou du foulard islamique à l’université ?

Mais :

– Personnellement êtes-vous favorable, opposé ou indifférent au port du voile ou du foulard islamique dans les salles de cours des universités ?

La différence est de taille. Qui est favorable au port du voile dans l’absolu ou à l’université ? La question n’a pas plus de sens que de dire : Êtes-vous favorable au port du crucifix à l’université ou dans la rue ?

À l’évidence, selon qu’on demande « Êtes-vous pour le fait de fumer dans la rue ? » ou « Êtes-vous pour interdire la possibilité de fumer dans la rue ? », les réponses seront différentes.

En clair, on peut être contre le port du voile dans l’absolu (et pour des raisons diverses) mais contre le fait de l’interdire. Or plusieurs médias font le raccourci :
Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion publique à l’IFOP, convient, lui, qu’il existe une différence entre les deux types de questions : « Ce n’est pas un sondage sur une possible interdiction. Mais on mesure le fait qu’il y a une forte opposition à cette pratique. Le résultat serait probablement différent si la question portait sur une éventuelle interdiction. Mais nous avons repris les termes des questions posées sur le voile par l’IFOP depuis le début des années 1990 pour pouvoir comparer avec le port du voile dans la rue ou à l’école. Cependant, au vu des résultats, je pense qu’on aurait une large majorité, y compris à gauche, pour l’interdiction. »

Peut-être. Mais comment savoir ? Selon le sondage, seuls 4 % des Français sont « favorables » au voile à l’université. Rappelons que les musulmans représentent environ 7,5 % de la population française.

De façon générale, parmi les 956 Français qui répondent, combien savent qu’à l’heure actuelle, ce port est autorisé ? Et combien savent exactement de quoi on parle ? Dans les termes de la question, il est précisé port du « voile » ou du « foulard islamique ». Comme s’il s’agissait de deux choses différentes. Interrogé à ce sujet, Jérôme Fourquet répond de nouveau que la terminologie historique de l’institut a été reprise. Semblant hésiter, il explique : « Pour moi, voile et foulard islamique, oui, c’est pareil. Et je pense que pour les personnes interrogées aussi. On donne les deux formulations, je pense, pour permettre la compréhension la plus répandue. »

Même si Jérôme Fourquet pense que les résultats seraient les mêmes, il serait intéressant de comparer les scores en enlevant le mot « islamique ». De faire le test avec juste le mot « foulard ». Ou seulement le « voile ». Car en présentant ces deux éléments, combien de sondés imaginent – à tort – qu’on leur parle de la burqa, ce voile intégral qui ne laisse voir que les yeux et qui est déjà interdit dans l’espace public ?

La question se pose d’autant plus quand on entre dans les détails du sondage pour savoir qui est favorable ou non au port du voile. Déjà, on découvre qu’ils sont... 0 % parmi les électeurs de Nicolas Sarkozy lors de la dernière présidentielle à se dire « favorables » au port du voile à l’université… Étonnante unanimité.

Mais la surprise est encore plus grande à gauche : à en croire l’étude, seuls 8 % des électeurs de François Hollande lors de la dernière présidentielle seraient « favorables » au port du voile à l’université. 5 % des électeurs de Jean-Luc Mélenchon. 3 % des électeurs de François Bayrou. Tous les autres seraient défavorables (ou indifférents) à cette pratique qui n’a jamais posé de problème majeur si l’on en croit la ministre de l’enseignement supérieur Geneviève Fioraso ou les présidents d’université.

Voilà qui ne surprend pourtant pas outre mesure Jérôme Fourquet. « Regardez comment Valls a réagi au quart de tour, et la façon dont il a été acclamé l’an passé à La Rochelle. L’opinion publique, notamment à gauche, s’est considérablement durcie sur ces questions au cours des dernières années. »

De là à en faire un enjeu majeur ? « Je ne dis pas que les électeurs de gauche sont taraudés par cette question tous les matins. Ce n’est pas forcément leur priorité », explique Jérôme Fourquet. Sauf qu’une fois de plus, le sondage suscite l’opinion. Et permet de faire de gros titres.


Voile à la fac : Fioraso refuse la polémique

RMC, 9 août 2013

Geneviève Fioraso a indiqué ce vendredi se refuser à toute polémique concernant le port du voile à l’université.
Alors que Manuel Valls a déclaré dans le Figaro de vendredi que l’ensemble des propositions du Haut conseil à l’intégration (HCI), révélées en début de semaine par Le Monde et parmi lesquelles figure l’interdiction du voile dans l’enseignement supérieur, sont « dignes d’intérêt », la ministre del’Enseignement supérieur a fait entendre un autre son de cloche : « Ne nous précipitons pas, ne faisons pas une polémique d’un sujet qui n’en est pas un », a réagi Geneviève Fioraso sur France Inter, estimant que le ministre de l’Intérieur s’était exprimé sur l’ensemble des 12 propositions du HCI, pas seulement celle concernant l’université. « Aucune université (...) n’a saisi le ministère à ce sujet (...) s’il n’y a pas de problème, ce n’est pas la peine d’en susciter », a ajouté la ministre.
Qualifiant les études supérieures de « facteur d’émancipation » et l’université de « lieu de toutes les cultures », Geneviève Fioraso a par ailleurs dit souhaiter que davantage de jeunes, et notamment de jeunes femmes voilées, aillent à la faculté.

8 Français sur 10 opposés au port du voile à la fac

Le rapport du HCI qui suggère, entre autres propositions, l’interdiction du voile islamique à l’université, a été transmis en mai à l’Observatoire de la laïcité, qui a repris les prérogatives du HCI en la matière.
Mais il n’engage que le HCI, a indiqué le rapporteur général de l’Observatoire, soulignant que l’université ne faisait pas à ce stade partie de son plan d’action.
Nombre d’élus de gauche se sont déclarés hostiles au principe d’une nouvelle loi proscrivant le voile ou le foulard islamique dans l’enseignement supérieur. Mais le ministre de l’Intérieur, qui semble avoir le soutien de l’opinion, n’a pas écarté cette possibilité.
Près de huit Français sur dix (78%) se disent opposés au port du voile dans les salles de cours des universités, selon un sondage Ifop publié par Le Figaro.

Clarifier les lignes entre public et privé

La France a banni en 2004 les « signes religieux ostentatoires » de toutes les écoles publiques. Une autre loi entrée en vigueur en avril 2011 interdit le port dans l’espace public du voile intégral, sous peine d’une amende de 150 euros.
Fin mars, le débat sur les contours de la laïcité a été relancé par une décision de la Cour de cassation qui a donné raison à une salariée d’une crèche privée qui contestait son licenciement pour port du voile islamique.
François Hollande a chargé l’Observatoire de la laïcité de lui transmettre des propositions pour répondre à cette décision de justice et clarifier les lignes de séparation entre secteur public et privé.


Voile à l’université : cette question ne mérite pas "une approche teintée d’islamophobie"

L’Express, Marie Caroline Missir, 6 août

Après la fuite de l’avis sur l’interdiction du voile à l’université, Jean-Loup Salzmann, président de la conférence des présidents d’université, dénonce un rapport déconnecté des réalités, et teinté d’islamophobie.
En savoir plus


Le port du voile à l’université remis en question

Le monde, Stéphanie Le Bars, 5 août 2013

À lire ici (édition abonnés)

C’est un rapport alarmiste et une proposition polémique que le Haut Conseil à l’intégration (HCI) a légués à l’Observatoire de la laïcité, détenteur depuis avril des prérogatives de sa mission sur la laïcité. Dans l’un de leurs derniers travaux que Le Monde s’est procuré, les membres de cette mission, menée par l’inspecteur général de l’éducation nationale Alain Seksig, se sont intéressés au respect de la neutralité religieuse dans l’enseignement supérieur.

Face aux "nombreux contentieux intervenus dans tous les secteurs de la vie universitaire", le rapport émet douze propositions parmi lesquelles l’adoption d’une loi interdisant "dans les salles de cours, lieux et situations d’enseignement et de recherche des établissements publics d’enseignement supérieur, les signes et tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse".

Sans aller jusqu’à étendre à l’enseignement supérieur la loi de 2004 en vigueur dans le second degré, l’idée est bien d’interdire aux étudiantes musulmanes de porter le voile islamique pendant les cours. Une proposition potentiellement polémique, alors que se discute l’opportunité d’interdire les signes religieux, et principalement le voile, dans d’autres sphères de la société française.

A l’appui de leur proposition, les rapporteurs rappellent la loi Savary de 1984, qui précise que la liberté d’expression accordée aux usagers de l’enseignement supérieur "ne doit pas porter atteinte aux activités d’enseignement et à l’ordre public". Les rapporteurs précisent aussi que le code de l’éducation prévoit que "le service public de l’enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique". Ils "voient donc mal pourquoi l’enseignement supérieur camperait dans un hypothétique statut d’extraterritorialité".

UNE "MONTÉE DE REVENDICATIONS IDENTITAIRES ET COMMUNAUTARISTES"

Selon les auditions menées ces derniers mois par la mission sur la laïcité, "certaines universités" sont en butte à "des demandes de dérogation pour justifier une absence, au port de signes d’appartenance religieuse, à des actes de prosélytisme, à la récusation de la mixité tant au niveau des étudiants que des enseignants, à la contestation du contenu des enseignements, à l’exigence de respect des interdits alimentaires, à l’octroi de lieux de culte ou de locaux de réunion à usage communautaire..."

"Les problèmes n’ont pas disparu, ne se sont pas raréfiés mais se sont banalisés, indique le rapport. Des personnalités auditionnées parlent même "d’actions souterraines" (associations cultuelles masquées, conférences à contenu politico-religieux, etc.). Des professeurs nous signalent, par exemple, la difficulté qu’ils éprouvent parfois à organiser des binômes d’étudiants des deux sexes pour des travaux de groupe."

Largement fondé sur une enquête de la Conférence des présidents d’université (CPU) de 2004, le rapport évoque aussi, sans les quantifier ni les situer, des atteintes à la laïcité "dans certaines universités où des tenants de courants chrétiens évangéliques ou néobaptistes critiquent les théories darwiniennes de l’évolution au profit de thèses créationnistes. Ailleurs, des écrits de Voltaire, de Pascal ou de Camus peuvent être rejetés". La mission "laïcité" du HCI relaie donc le "malaise d’un nombre croissant d’enseignants" face à ces "symptômes de la montée de revendications identitaires et communautaristes, de fermeture, voire d’ostracisme, de refus de certains savoirs".

BILAN POSITIF DE LA LOI DE 2004

S’il reconnaît que "tous les établissements ne sont pas touchés par ces phénomènes" et que certains y ont apporté "des solutions concrètes et apaisantes", le HCI craint néanmoins une certaine "cacophonie" et juge "préférable d’anticiper".

Il estime donc "nécessaire que l’ensemble des établissements publics d’enseignement supérieur intègrent un article dans leur règlement intérieur visant à prévenir les contestations ou récusations d’enseignement". Il recommande "l’insertion de l’étude du principe de laïcité dans les programmes des formations débouchant sur un métier des fonctions publiques d’État, hospitalière ou territoriale ou sur un métier des carrières sanitaires et sociales".

La mission "laïcité" propose enfin que "toute occupation d’un local par une association étudiante fasse l’objet d’une convention d’affectation des locaux, qui ne peuvent en aucun cas être affectés aux cultes". Dans la même ligne, "les Crous étant soumis au principe de laïcité, ils ne peuvent compter de lieu de culte sur leur site, ni fournir de restauration de nature confessionnelle".

Dans ce contexte, le Haut conseil à l’intégration rappelle que "la loi de mars 2004 a contribué à diminuer les tensions dans les établissements du secondaire". L’Observatoire de la laïcité, dans son point d’étape remis le 25 juin au président de la République, établit aussi un bilan positif de la loi de 2004, mais ne paraît pas pour autant enclin à reprendre les conclusions du HCI.

"Nous entendons nous faire notre propre religion", indique-t-on à l’Observatoire. Ces recommandations devraient être publiées dans le rapport annuel du HCI, à l’automne, à moins que l’Observatoire de la laïcité, soucieux "d’apaisement" sur ces sujets, ne préfère les enterrer.


Voile à l’université : interdire les "signes religieux ostensibles" serait "une très mauvaise idée"

(J.L. Salzmann, Président de la CPU)
NousVousIls, 6 août 2013

Le pré­sident de la CPU a estimé hier qu’interdire le port de signes reli­gieux à l’université, comme pro­posé par le HCI dans un rap­port divul­gué par Le Monde, serait "une très mau­vaise idée".

Un rap­port fondé sur "une enquête de la CPU"

D’après l’article du Monde, le rap­port du HCI, qui dénonce les entorses faites au prin­cipe de laï­cité dans plu­sieurs établis­se­ments sans les nom­mer expli­ci­te­ment, serait "lar­ge­ment fondé sur une enquête de la Conférence des pré­si­dents d’université (CPU) de 2004".

"La CPU a rédigé en 2004 un guide de bonnes pra­tiques tout à fait rai­son­nables sur la laï­cité. Ce guide ne prône en aucun cas l’interdiction des signes reli­gieux, même osten­sibles, pré­cise pour­tant Jean-Loup Salzmann. Ce serait contraire à la tra­di­tion uni­ver­si­taire faite de dia­logue et non d’interdiction".
L’université ne doit pas empê­cher les étudiants d’afficher leurs opi­nions, selon Salzmann

Le pré­sident estime que, les étudiants étant majeurs, "le rôle de l’université n’est donc pas de les empê­cher d’exprimer et d’afficher leurs opi­nions, égale­ment reli­gieuses, mais de leur apprendre à res­pec­ter celles de leurs cama­rades et à en dis­cu­ter, et ceci "tant que ces opi­nions sont dans le res­pect de la léga­lité". D’autre part, il juge la loi de 2004 régle­men­tant le port de signes reli­gieux dans les établis­se­ments sco­laires ne peut être éten­due à l’université puisque cette der­nière "n’est pas obli­ga­toire. Les règles qui s’appliquent à elle ne peuvent donc être com­pa­rables à celles des établis­se­ments scolaires".

[…]