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Le bac continue de doper le business du soutien scolaire (L’Humanité, Laurent Mouloud, 15 juin 2011)
jeudi 16 juin 2011
Alors que les épreuves du baccalauréat débutent aujourd’hui pour 654 548 candidats, le poids pris par le marché des cours particuliers devient inquiétant. Profitant avant tout aux familles aisées, il aggrave de plus en plus les inégalités scolaires.
Pour les officines de soutien scolaire, le baccalauréat, c’est un peu comme Noël pour les vendeurs de jouets : la promesse d’engranger un joli pactole.
Et cette année ne devrait pas déroger aux précédentes qui ont vu ce « marché de l’angoisse » se développer à vitesse grand V, progressant de 10 % l’an. Acadomia, KeepSchool, Complétude… Profitant à plein du discours anxiogène disqualifiant l’Éducation nationale et glorifiant la réussite individuelle, les quelque 300 entreprises répertoriées génèrent désormais un chiffre d’affaires annuel d’environ 250 millions d’euros. L’ensemble du secteur du soutien scolaire privé – 85 % s’effectue encore « au noir » – représenterait, lui, plus de 2,2 milliards d’euros.
Nouvelle fracture sociale
Seulement voilà. Cet essor, qui fait saliver les grands groupes du secteur bancaire, de l’assurance ou des mutuelles, inquiète de plus en plus certains acteurs publics. Début juin, un rapport de la Commission européenne dénonçait l’ampleur prise par cette « éducation de l’ombre ». qui ne fait qu’accentuer « la fracture socio-économique » entre les élèves. C’est l’une des caractéristiques des cours à domicile. Ils profitent en priorité aux familles les plus favorisées. Encouragées par les déductions fiscales (50 % du montant des cours déduit des impôts), elles utilisent ce soutien scolaire pour développer une « stratégie d’excellence » pour leur progéniture. Comme le montre l’étude du sociologue Dominique Glassman, le profil-type de ces « consommateurs » n’est pas un élève en difficulté mais un bon élève d’un bon établissement confronté à une prochaine orientation – fin de 3e ou terminale. Au final, seuls 3 % des lycéens professionnels utilisent des cours privés contre 20 % des lycéens de séries générales. Parmi eux, les enfants d’enseignants, de cadres ou de chefs d’entreprise sont surreprésentés.
« Plus l’école fonctionne comme un marché, mettant en concurrence des établissements impitoyablement classés sur une échelle hiérarchique, plus la tendance à user de l’arme des cours particuliers s’impose », soulignait encore le sociologue, qui prônait des dispositifs de soutien « publics, gratuits et ouverts à tous ».
Las. Loin de freiner l’expansion des cours privés, les politiques menées ces dernières années l’ont encouragée. En créant le chèque emploi service et en simplifiant les procédures d’agrément, la loi Borloo de 2005 a dynamisé ce secteur. De même, en 2007, un crédit d’impôt pour les contribuables non imposables a élargi le soutien scolaire au-delà des seules familles aisées. Ou comment l’État favorise lui-même la concurrence du privé…
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