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« Que restera-t-il des universités ? » Tribune de Guillaume Leyte, président de Paris-II, Educpros, 5 avril 2013.
dimanche 7 avril 2013, par
Président de l’université Paris 2 - Panthéon-Assas depuis juin 2012, Guillaume Leyte s’élève dans une tribune contre le projet de loi sur l’enseignement supérieur et la recherche, qui engendre "un système d’une lourdeur sans précédent" et "traduit en fin de compte une profonde déconsidération pour les universités, maillon faible de l’enseignement supérieur". Point de vue.
Le texte intégral de cette tribune sur le site des Échos, sous le titre "Une réforme des universités dictée par le dirigisme", et sur celui d’Educpros.
Les universités, plus qu’aucun service de l’Etat, ne cessent depuis des années d’être « réformées » dans des sens divers et contradictoires alors qu’elles n’aspirent qu’à remplir au mieux et sereinement leur mission de service public d’enseignement et de recherche. Il apparaît en effet comme une évidence que les réformes institutionnelles sont, pour les gouvernements successifs, la panacée de l’enseignement supérieur.
Sans doute la loi de 2007 dite LRU (libertés et responsabilités des universités) méritait-elle des ajustements, clarifiant par exemple les responsabilités financières respectives de l’Etat et des universités ou assurant une plus grande représentativité de conseils qui ont par ailleurs fait la preuve de leur efficacité du fait de leur composition resserrée. Mais elle nécessitait surtout d’être amendée dans le sens d’une véritable autonomie, notamment pédagogique et donc de la liberté d’innover en faveur des étudiants.
Or le projet de loi qui vient d’être présenté au conseil des ministres et qui ambitionne d’opérer une refonte en profondeur du paysage universitaire et de la recherche réduit encore l’autonomie des universités – qui s’est résumée jusqu’ici à l’apprentissage de l’autodiscipline budgétaire – au profit d’un de ces montages technocratiques complexes et toujours inefficaces qui sont une des spécialités françaises que l’étranger ne nous envie pas.
Nul ne conteste les louables objectifs, au demeurant peu originaux, du projet de loi. Mais ce projet sans véritable ambition, notamment européenne, aveugle aux distinctions disciplinaires qui prévalent partout dans le monde, est marqué par un dirigisme daté qui conduira inévitablement, au rebours des modèles internationaux toujours cités en exemple, à étouffer l’enseignement supérieur et les universités sous le poids des structures et des contraintes.
Car l’actuel projet de loi, loin de reconnaître aux universités une plus grande liberté, crée un système, au sens philosophique, d’une lourdeur sans précédent. Au mépris des engagements antérieurs de l’Etat – qui a par exemple reconnu la constitution de regroupements de type confédéral – le nouveau projet prévoit, en liaison avec « l’acte III » de la décentralisation, pour toute la France, une trentaine de regroupements. L’Etat contracterait avec ceux-ci « en respectant la diversité des situations » a affirmé Mme Fioraso en présentant le texte au conseil des ministres, et servant « des objectifs d’autonomie réelle ».
Le projet ne laisse pourtant que peu de place à ces ambitions : des conseils empilés à la composition compliquée introduiront rivalités (y compris politiques) et clivages au sein des nouveaux ensembles, la dyarchie possible opposant conseil d’administration et conseil académique risque de paralyser l’ensemble, le gigantisme structurel annihilera nécessairement la visibilité d’institutions qui travaillent depuis des décennies à assurer, en nom propre, un enseignement et une recherche de qualité. Faut-il préciser qu’étant donnée la situation financière tendue de nombre d’universités, ces nouvelles structures consommeront inutilement des crédits qui font déjà défaut ?
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